Kurma, mon tour du monde en voilier
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Christmas Island - Cocos Keeling - Sri Lanka (fin 1986)

NB : je n'avais ni GPS, ni SATNAV, ni radar : je naviguais au sextant

Panama - Galapagos cocos christmas Sri Lanka Indes
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Au départ de Darwin, nous filons droit sur Chrismas Islands, puis sur les îles Cocos Keeling, avant d'aborder la grande traversée de l'océan Indien, qui nous mènera jusqu'au Sri Lanka, puis aux Indes.

Bonjour, Christmas !

Carte_Christmas.jpg

Nous sommes seuls au mouillage. Le muezzin appelle à la prière plusieurs fois par jour, mais surtout le matin de très, très bonne heure, ce dont je me serais bien passé après plusieurs nuits de quarts en mer.
Sur l'île, il y a une usine de phosphate où beaucoup d’immigrés indonésiens travaillent. Il paraît que l’on va y construire une immense prison genre centre de bagne... Perdue au milieu de l’océan, les bagnards ne risqueraient pas de jouer à Papillon et se sauver à la nage.
Nous avons raté la principale attraction de l'île, à savoir la saison des amours des crabes rouges (on arrive toujours ou trop tôt ou trop tard... il va falloir que je programme mon futur voyage en rapport des événements folkloriques).

(Documentation extraite de Wikipédia)

Chaque année au printemps, l’île Christmas est envahie par le crabe rouge (Gecarcoidea natalis), et est, pendant près d’un mois, presque paralysée par cette invasion pacifique de milliers de crabes rouges.
...
Cet exode annuel se déroule au printemps c’est-à-dire en novembre dans l’hémisphère sud.
Sur cette petite île d’à peine 135 km², plusieurs espèces de crabes se côtoient. Le plus petit, le crabe rouge, est l’attraction de l’île. Il est impropre à la consommation. La période de transhumance dure de 9 à 18 jours et il est alors préférable de fermer sa porte.
Jusqu’à 7 000 crabes par km progressent ensemble à environ 10 cms par seconde.
Les mâles ouvrent la marche, les gros en avant et les petits derrière suivis par les femelles. C’est un véritable déferlement grouillant qui se déplace sur un front de plusieurs kilomètres.
Ceux-ci envahissent tout : les routes, les maisons, les voitures, les toits, les terrains de golf, et même les voies utilisées par les wagons pour le transport du phosphate, unique ressource de l’île.
...
A leur arrivée sur les plages, les crabes barbotent dans l’eau afin de reprendre des forces. Ils se réhydratent et boivent goulûment.
Ensuite, les géniteurs construisent des terriers sur les terrasses côtières et s’en disputent la propriété à grands coups de pinces.
Les femelles rejoignent ensuite les mâles. L’accouplement se produit à l’intérieur du terrier. Puis, le mâle entreprend le voyage en sens inverse vers la jungle.
...
A la nuit, les femelles se dirigent vers la mer et sont saisies de véritables spasmes. Accrochées aux rochers, et parfois aux falaises hautes de 8 m, elles secouent leur abdomen au-dessus de l’eau pour libérer la ponte.
Chaque femelle expulse près de 100 000 œufs. En grappes compactes, les larves minuscules restent un peu moins d’un mois entre deux eaux.
Les eaux sont alors transformées en une gigantesque nappe gluante.
Puis, les bébés crabes, tout rouges et aux yeux noirs, sortent de la mer. Ils forment d’immenses tapis rouges grouillant sur toute la côte... Une nouvelle invasion commence ...


Notre escale ne peut être longue, car la mousson approche, et nous voudrions nous arrêter aux Iles Cocos.

Cocos (Keeling) Islands

Nous recherchons comme d’habitude une île avec des coraux et des poissons de toutes les couleurs. Encore un petit effort, quelques centaines de milles (une bricole pour Kurma et son équipage !) et nous voici arrivés, poussés par le vent.
Bien entendu, avec notre "chance habituelle", le feu d’entrée au port ce soir-là est en panne, il nous faut donc tirer des bords toute la nuit contre une mer formée. L'’Indien ne nous fait pas de cadeaux, les vagues sont disproportionnées par rapport au vent à cause des moussons.
Et juste à l'endroit où nous avions prévu d'amarrer, il me faut faire attention à un petit caillou pas éclairé. La nuit va encore une fois être longue et stressante...

Kurma Ile Christmas.jpg

Au lever au soleil, nous sommes juste devant la passe dont le feu ne fonctionne pas, "à quelques encablures" comme disent les vieux marins. Kurma avance au milieu des patates de corail. Bientôt, l’eau turquoise et le calme du lagon se révèlent à nos yeux éblouis.
Au mouillage, nous rencontrons quelques voiliers amis, notamment l'Etourdi II, un Mélodie mené par Jacques et Béatrice, dont je vais conter l'histoire : une rencontre sur un quai de Méditerranée, la décision de partir faire un tour du monde en deux ans... Les voici à Cocos, en pleine forme après moultes aventures.  Le reste de leur voyage se fera sans problème majeur. Rien que de banal, me direz-vous, mais je ne vous ai pas précisé : Au départ, Jacques a 74 ans, Béatrice un peu moins... Bravo à eux !
.Il y a aussi le trisbal Fébus, que nous retrouverons souvent sur la route du retour, avec, à son bord, x et x, et leur fille x, la grande copine de Cloé et Damien.
Et le Natacha 2 avec Ruth et Richard, toujours en train de rigoler, qui nous raconte ses exploits en Australie, sur son vélo à une seule roue ! comme il le dit lui-même, ce vélo-là, personne ne me le volera !
Et Philoé sur leur Ovni , avec leur bébé né en Australie.
Nous échangeons nouvelles et anecdotes. Ici, les autochtones sont méfiants vis-à-vis des français. Il y a de quoi...

C'est un couple de français en voilier qui s'est comporté en escrocs. Alors qu'ils avaient été gentiment accueillis à terre par les habitants à cause de la mauvaise saison, ils sont repartis un beau matin  en catimini en emportant à leur bord une bonne partie du matériel "emprunté" sur les bateaux des habitants.
Encore une raison pour nous d’avoir honte de notre drapeau !

Cocos Keeling

L’endroit où nous sommes autorisés à rester (point rouge sur la carte ci-contre) est en fait le lieu de villégiature des habitants. Ils viennent y passer le week-end,  laissent leurs planche à voile, leur matériel. Ils travaillent à la base de quarantaine sur un autre îlot où l’on parque, veaux, vaches, cochons en partance pour l’Australie.
Ces îles qui appartiennent à l’Australie sont dirigées par un gouverneur. Elles sont dotées d'un aéroport et d'une poste, et pour ceux qui font collection de timbres, vous ne les trouverez pas ailleurs !, nous avons l’autorisation de complaisance de séjourner le temps que l’on veut du moment que l’on ne dérange pas et que l’on ne cherche pas a aller sur d’autres îlots.
Une façon pour les habitants de se préserver des touristes quels qu’il soit.

Mais on peut pique-niquer à terre et même passer la nuit dans des cabanes en palmes de cocotiers. Il n’y a pas de moustiques,  et les cocos attendent juste qu’on les cueille car il s'agit de cocotiers nains.
Les enfants s'amusent à dormir dans des hamacs, ils ont construit une cabane et se sont déguisés en indiens avec des feuilles de palmiers.

Le sable est blanc et fin comme de la farine, les fonds sont magnifiques et pour pas polluer, nous descendons nos poubelles à terre. Une fois par semaine, une pirogue vient les récupérer pour les brûler. On peut aussi monter à son bord pour se rendre au village faire quelques achats auprès de l'unique boutique de l'île.
Bien sûr, tout n'est pas parfait !
Les tempêtes tropicales passent par là, raison un peu triste pour laquelle nous ne pourrons pas rester très longtemps, d'autant que la saison des moussons approche.
Et puis, l'approvisionnement en eau potable est délicat, nous pouvons juste aller chercher quelques jerricans d'eau dessalée au village.

Déguisements

Chacun prépare son départ, on discute ferme sur la direction à prendre : soit au  plus court, avec beaucoup de vent dans le nez, soit au plus long, avec un détour par les Maldives.
J'opte pour le plus court possible, et même tout droit, ce qui fait rire tout le monde, nos amis de Fébus vont vers les Maldives, des australiens veulent faire un crochet mais sans s’arrêter.
Nous nous donnons rendez-vous dans 3 semaines à Galles, mouillage obligé du Sri Lanka. 

BYE BYE le paradis !

La mousson nous rattrape et c’est parti ! Pour l’instant, et pendant quelques jours, nous l’avons juste comme il faut de travers et malgré une mer formée, 2 à 3 mètres de creux, Kurma prend son pied sous génois et grand voile.
Le rythme est pris a bord, le pilote fait son boulot et de temps en temps une vague de travers plus grosse frappe la coque. la première semaine se passe normalement mais depuis que ma route change vers le nord, la mousson vient de plus en plus vers l’avant et nous devons malgré la chaleur fermer les capots, car la mer court sur le pont à chaque vague... suivent les grains avec pluie et le vent sous de gros nuages noirs, qui nous obligent à réduire les voiles et que l’on voit arriver de loin le jour, mais pas la nuit, alors c’est la course avec les voiles qui battent et risquent de vous faire passer par dessus bord.
Bon ! Voilà la grande voile qui me lâche, je l’avais reprise à Cairns, mais elle est usée par le soleil et se déchire aux coutures. Il faut affaler, la sortir de son rail sur le mât, la rentrer dans le carré, mettre le tourmentin car nous ne pouvons pas rester sans grand voile. puis une fois le bateau reparti, je me mets à la couture ce qui est pas une sinécure...
Je sais, il faut être maso pour faire du bateau, et voyager avec, alors là je ne vous en parle pas !
On s’ennuie pas pendant cette traversée, mais vivement l'arrivée !
Les enfants ne sortent plus (trop dangereux), ils attendent comme nous en jouant avec leurs Lego par terre sur les coussins.
La technique est éprouvé maintenant par gros temps, tous les coussins des couchettes sont au sol et ils jouent et dorment là, il paraît que ça bouge moins !
20 jours de gymkhana... Depuis un jour ou deux, nous croisons des cargos qui, pour éviter la mousson, longent la côte indienne et Sri Lankaise. 
Enfin le Sri Lanka se profile à l'horizon...

Sri Lanka : Port de Galles

Mouillage dans l'enceinte de l'armée.
Pas de problème car les lieux sont surveillés.

Nous faisons connaissance avec un bijoutier. Très sympathique, il se charge pour nous (gratuitement !) des formalités d'entrée dans le pays, nous fait visiter sa maison et rencontrer sa famille. Etant commerçant, il nous propose d'acheter quelques pierres semi-précieuses, il y en a beaucoup dans le pays. Plus tard, sa fille nous confectionnera tous les drapeaux pour le reste du voyage, ce qui nous enlève une super épine du pied car nous n'avons pas tous les tissus qu'il faut, et hisser les drapeaux en arrivant dans un pays est une obligation et une politesse.
Il nous renseigne aussi sur la façon de visiter le pays. Nous suivons ses conseils : 100 dollars pour 2 semaines pour de charmants hôtels anglais et un service impeccable tous les soirs.
Le bateau est en sécurité dans ce mouillage, nous partons donc à la découverte du pays. Un voyage plein d'imprévus, vraiment folklorique, en bus locaux avec des arrêts constants même quand il n’y a plus de place pour faire monter des voyageurs qui, tant bien que mal, s’accrochent à la carcasse du minibus. Nous sommes coincés au fond, impossible de descendre avant le terminal.
Les sites sont superbes : temples et bouddhistes en robe safran, singes (hélas voleurs d'appareil photo), mais aussi de magnifiques boudhas dans toutes les positions dont certains sont recouverts de feuille d'or.
Les indiens utilisent au maximum la noix de coco pour tout ce que l’on peut imaginer : Cordes, planches, alcool, etc.. Ils ont trouvé un moyen astucieux pour aller chercher les noix de cocos dans les arbres : au lieu de redescendre à chaque fois, ils ont tendu des cordages (faits de bourre de coco) entre les arbres et font les équilibristes d’un arbre à l’autre. Nous les regardons marcher sans sécurité sur ces cordes tendues...
Ils récupèrent le jus des fleurs qu'ils incisent et le font fermenter pour fabriquer leur alcool.
Nous voyons aussi de magnifiques plantations de thé dans les hauteurs de l'île, avec leur armée de ramasseuses qui utilisent un sac-poubelle découpé en guise d'imperméable pour se protéger de la pluie (qui tombe souvent) et de la fraîcheur des nuits (10°. Il nous faudra utiliser des couvertures pour dormir).
Sur la côte, à une centaine de mètres du bord, les pêcheurs à la ligne, perchés sur des piquets plantés, pêchent de petits poissons genre sardine. Dans un village voisin, sur la plage, nous arrivons juste pour le retour des pirogues à balancier : accrochés au bord, de superbes requins dont ils tirent un maximum de ressources : les ailerons vendus à prix d'or, puis la peau, l'huile, etc...
Leur façon de conduire les minibus est assez pittoresque : à toute vitesse au milieu de la route, à cause des bords défoncés, ils attendent le dernier moment pour serrer à gauche lorsqu'ils croisent un autre véhicule. On a chaque fois la tentation de fermer les yeux... les accidents sont malheureusement nombreux.

Au cours de notre séjour, nous retrouvons les Viura, des italiens : Mathilde, Carlo et leur fils Marco. Puis Robert et Linda, à bord du Liberty. Et enfin, Phillipe, Natalie et Aliocha du voilier Tao, qui gentiment nous proposent de surveiller Kurma pendant nos ballades dans les terres.

 
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